C’est à la BPI, au Centre Pompidou, qu’Isabelle Diu, directrice de la Bibliothèque Doucet, a ouvert la soirée consacrée aux donateurs par un hommage à Claude Simon que nous publions ici.

Une collaboration jusqu’alors inédite entre la BPI et la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet a pu aboutir à cette exposition qui donne à voir et à lire Claude Simon. Écrivain jugé souvent difficile, mais prix Nobel de littérature, plus célébré à l’étranger qu’en France, Claude Simon est un des plus grands romanciers français du XXe s. Il est à la fois un prosateur d’une inventivité et d’une nouveauté toujours surprenante et en même temps un grand témoin, marqué par les deux grandes guerres, de ce chaos du monde qu’il donne à voir et saisit dans son écriture. Il voulait être peintre, il fut aussi un vrai grand photographe et un cinéaste. Il restera un des romanciers français majeurs.

Le centenaire de la naissance de l’écrivain a été l’occasion de nombreuses célébrations, notamment de colloques universitaires et d’expositions, dont la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet, qui conserve le fonds Claude Simon, a été partenaire. Citons le colloque du centenaire en janvier 2013 à l’Université Paris III-Sorbonne nouvelle, au cours duquel Sophie Lesiewicz et moi-même avons présenté une communication sur les archives de Claude Simon ; une exposition et un colloque à Arbois en octobre pour lequel des prêts ont été consentis ; une exposition sur Claude Simon photographe et une journée d’étude à Carcassonne en décembre, à laquelle nous avons aussi participé.

C’est en 1984, peu de temps avant sa mort, que Claude Simon décide de léguer ses archives à la Bibliothèque Littéraire Jacques Doucet, à Paris. Or, la démarche de Claude Simon épouse exactement celle du fondateur de cette bibliothèque. Dès sa création en 1916, elle a été conçue comme un miroir de la modernité littéraire et artistique, mais aussi comme une véritable « archive littéraire » - qui rassemble tous les documents permettant d’éclairer la genèse d’une œuvre et de comprendre son évolution (manuscrits mais aussi papiers personnels d’un écrivain et tous documents en lien avec l’œuvre (dessins, photographies, gravures, etc.) Les archives Claude Simon (qui comprennent les manuscrits des œuvres, d’importantes archives familiales, quelques dossiers de travail et un ensemble considérable d’articles sur la réception de l’œuvre) sont donc éminemment représentatives des fonds de la Bibliothèque Doucet. Elles sont en outre singulières, puisqu’elles ont été choisies par l’écrivain lui-même avant sa mort – qui a fait le choix par exemple de donner une partie de ses archives familiales, qui sont un des matériaux de son œuvre (notamment dans les Géorgiques), mais en revanche pas sa correspondance.

Ces archives sont surtout tout à fait singulières en ce qu’elles révèlent la fabrique du roman simonien : à travers les plans composés de codes couleurs, les montages de fragments, nous sont rendues visibles les techniques de collage, de cadrage, à l’œuvre de manière abstraite dans l’écriture. Dans cet atelier reconstitué grâce aux manuscrits, nous pouvons alors saisir au vif la méthode de travail de l’écrivain.

L’exposition se déploie en plusieurs cercles (cercle de l’écriture, cercle de la réception) dans lesquels les documents (livres, manuscrits, photos ou films) sont éclairés aussi par des interviews. Les diverses facettes de l’œuvre se donnent à voir et à entendre grâce au travail de scénographie très attentif de l’écrivain et plasticien Alain Fleischer qui a su donner une belle visibilité et lisibilité à l’écriture de Claude Simon.

Un compte rendu de l’exposition « Claude Simon, l’inépuisable chaos du monde » peut être consulté dans notre rubrique « Activités, Manifestations et expositions ».